19 Décembre 2024
Prévoyance

Anticiper et préparer sa succession

Jacques Dayer Par Jacques Dayer
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Succession : à quoi faut-il être attentif ?

Se préoccuper de sa succession et veiller à la planifier avec soin peut décourager certaines personnes. Pourtant s’y préparer, quelle que soit sa situation familiale, est recommandé pour éviter les mauvaises surprises et les risques de conflit ultérieurs. Deux raisons principales expliquent le peu d’empressement des citoyens à se pencher sur leurs affaires. Premièrement, parler de succession, c’est aborder sa propre fin. Par ailleurs, si évoquer la mort ne saurait la provoquer, ce ressort mental joue tout de même en plein. Deuxièmement, la thématique demeure très technique, juridique, et de prime abord, difficile d’en comprendre les tenants et aboutissants sans avoir peur de se tromper. Selon des chiffres datant de 2023, seul un tiers des Suisses ont déjà organisé leur succession. Pourtant quelque 90 milliards de francs sont hérités chaque année.

Être au clair avec soi-même

Le sujet est donc d’importance et ne saurait être occulté. Heureusement, des spécialistes existent et leur travail consiste à vous aider. Les banques en font partie, elles agissent comme porte d’entrée, à l’image de la Banque Cantonale du Valais (BCVS) et de son service de Planification patrimoniale et financière. Elles fournissent un conseil global. Une seule interrogation, générale, doit occuper le client qui s’informe auprès de son conseiller bancaire : qui veut-il avantager dans sa succession ? Toutes les possibilités en lien avec ce souhait seront abordées, évidement dans les limites du cadre légal. La banque rendra également attentive sa clientèle aux conséquences, pour les héritiers, de l’absence de planification successorale.

Une seule interrogation, générale, doit occuper le client qui s’informe auprès de son conseiller bancaire : qui veut-il avantager dans sa succession ?

Directeur adjoint, Responsable de la Planification patrimoniale et financière, BCVS
De l’importance d’un testament

Le droit successoral suisse, âgé de plus de 100 ans, repose sur un schéma de famille classique, qui favorise le conjoint et les enfants, - principaux héritiers en cas de décès. Il était alors peu question de divorce, de famille recomposée ou de concubinage. Le droit a été modernisé et de nouvelles dispositions sont entrées en vigueur au 1er janvier 2023. De manière générale, la loi a élargi la quotité disponible, soit la part dont le défunt peut disposer librement (par testament notamment), en dehors des réserves légales. Ainsi, les conjoints ont la possibilité de mieux se protéger mutuellement ou de favoriser leurs propres enfants, beaux-enfants ou enfants du partenaire. 

Voyons un peu plus en détail les éléments importants qu’il faut retenir.

  • Dans le cas d’un couple marié ayant des enfants communs, la quotité disponible se monte désormais à 50% (contre 37,5% dans l’ancien droit). Les enfants n’ont plus droit qu’à 25% de la succession (contre 37,5% dans l’ancien droit), et le quart restant revient au mari ou à l’épouse. Le conjoint survivant pourrait ainsi se voir attribuer, par testament, jusqu’à 75% de la succession.
    S’il n’existe aucune disposition testamentaire (ou pacte successoral), la loi s’applique : le conjoint (marié ou partenaire enregistré) et les enfants biologiques reçoivent respectivement la moitié de la succession. Les éventuels beaux-enfants ne reçoivent, eux, pas un sou.
  • Dans le cas de concubins avec enfants communs, la réserve héréditaire de ces derniers a été ramenée de 75% à 50%. La quotité disponible est donc plus importante. Dans ce cadre, les concubins peuvent s’attribuer jusqu’à la moitié de la fortune. Il n’en demeure pas moins que la charge fiscale, en lien avec ces attributions, est souvent lourde.
  • Enfin, dans le cas de personnes non mariées et sans enfants, celles-ci peuvent disposer librement de l’entier de leur fortune, et par exemple la transmettre à leur partenaire. La partie qui revenait obligatoirement aux parents, dans l’ancien droit, a été supprimée. Malgré tout, l’impact fiscal peut, ici aussi, être conséquent.
  • Les conjoints en cours de procédure de divorce perdent leur qualité d’héritiers réservataires, selon les conditions fixées par le Code civil (art. 472).

De manière générale, la loi a élargi la quotité disponible, soit la part dont le défunt peut disposer librement (par testament notamment), en dehors des réserves légales.

Directeur adjoint, Responsable de la Planification patrimoniale et financière, BCVS
Conserver son patrimoine dans la famille

Le cas des familles recomposées, toujours plus nombreuses dans notre société, est intéressant. Si aucune disposition n’est prise, une partie du patrimoine peut échapper à la propre famille du défunt. La substitution fidéicommissaire peut, à cet effet, représenter une bonne solution. Prenons un exemple pour mieux comprendre, soit celui d’un homme divorcé, ayant eu deux enfants d’un précédent mariage, qui se remarie. A son décès, sa nouvelle épouse aura droit à une réserve héréditaire correspondant au quart de la masse successorale. Idem pour ses enfants. Pour la quotité disponible, l’homme peut instituer son épouse comme héritière grevée et ses enfants comme héritiers appelés. Ainsi au décès de celle-ci, la fortune reviendra aux enfants de monsieur. Sans ces mesures, la quotité disponible pourrait être attribuée aux héritiers de sa 2e femme. Il est à relever que la substitution fidéicommissaire est généralement avantageuse fiscalement.

Cet exemple rappelle l’importance d’anticiper sa succession, de s’informer auprès de professionnels pour pouvoir et faire ses choix en toute connaissance de cause.

Si aucune disposition n’est prise, une partie du patrimoine peut échapper à la propre famille du défunt.

Directeur adjoint, Responsable de la Planification patrimoniale et financière, BCVS
Bon à savoir

La prévoyance n’appartient en principe pas à la masse successorale et, à ce titre, ne peut être incluse dans les dispositions testamentaires. 

La liste et l’ordre des bénéficiaires sont différents entre le pilier 3a, la LPP obligatoire et sur-obligatoire, et sont fixés par la loi et les règlements des caisses de pension.

Cette situation recèle parfois des avantages, notamment fiscaux, pour le concubin (l’impôt sur la prévoyance étant généralement, dans les cantons romands moins élevé que celui sur les successions), mais aussi des inconvénients, par exemple pour un enfant majeur issu d’un précédent mariage. 

Pour remédier à cela, une motion demandant un assouplissement de l’ordre des bénéficiaires du pilier 3a est en cours d’examen auprès du Conseil fédéral.